Skip to main content
Non classé

Réforme de l’instruction conventionnelle et recodification des MARD : ce que change le Décret n° 2025-660 du 18 juillet 2025

Par Léna Mathon11 août 2025Pas de commentaires

La justice civile entre dans une nouvelle ère avec le décret n°2025-660 du 18 juillet 2025, qui réforme en profondeur le déroulement du procès civil. Deux axes majeurs sont au cœur de cette transformation : la mise en état conventionnelle et le renforcement des modes amiables de résolution des différends (MARD).

📅 ⚠️ Attention : cette réforme entre en vigueur le 1er septembre 2025.

🔄 Vers une coopération renforcée entre juge et parties

Première nouveauté fondamentale : le juge n’est plus seulement l’arbitre du litige, il devient un orienteur, chargé d’inciter les parties à rechercher une solution amiable et de proposer le mode le plus adapté (modification de l’article 21 Code de procédure civile).

⚖️ L’instruction conventionnelle : nouveau principe du procès civil

Le décret n° 2025-660 du 18 juillet 2025 opère un changement de paradigme en érigeant l’instruction conventionnelle des affaires civiles en principe, la mise en état par le juge devenant l’exception (article 127, al. 1 du Code de procédure civile).

Les parties peuvent désormais :

  • Délimiter l’objet du litige en précisant leurs prétentions respectives,
  • S’accorder sur le calendrier d’échange de pièces et de conclusions, le juge pouvant écarter des débats les moyens et pièces communiqués sans motif légitime après la date convenue,
  • Décider de recourir à un technicien.

Choix de l’instruction conventionnelle = audiencement prioritaire

Deux voies pour mettre en œuvre cette instruction :

  1. La convention simplifiée : un accord d’instruction souple entre avocats, sans formalisme, simplement notifié au juge.

Avantages :

  • Elle interrompt le délai de péremption.
  • Elle permet un renvoi de l’affaire à 6 mois ou 1 an, délai ajusté selon le terme de la convention et la complexité du litige.
  • Juge toujours compétent en cas de difficultés relatives à l’instruction conventionnelle ou exception de procédure, fin de non-recevoir, incident.
  • En appel, interruption des délais pour conclure ou former un appel incident (articles 906-2 et 908 à 910 Code de procédure civile).
  1. La procédure participative de mise en état (CPPME) : voie plus formalisée reposant sur un accord écrit, contresigné par avocats. Elle offre un cadre juridique structuré tout en favorisant la coopération.

Avantages :

  • Interruption du délai de péremption de l’instance (article 130-3, 1° du Code de procédure civile) ;
  • Le juge n’est pas dessaisi.
  • En appel, interruption des délais « Magendie » jusqu’à l’avis du greffe matérialisant la reprise de l’instruction judiciaire (article 915-3 du Code de procédure civile).

🧑‍🔬 Le recours au technicien : un outil amiable renforcé

Le décret modernise aussi le recours aux experts puisque les parties peuvent désormais recourir à un expert conventionnel en dehors ou pendant une instance :

  • Le rapport d’un expert désigné conventionnellement obtient désormais la même valeur qu’une expertise judiciaire.
  • L’interdiction pour le technicien de concilier est levée : il peut dorénavant participer à la résolution amiable du litige.
  • En cas de difficulté (désignation, exécution de la mission…), les parties peuvent recourir à un juge d’appui, même en dehors d’une instance.

🤝 Réforme des modes amiables de règlement des différends : un cadre unifié et incitatif

La recodification du Livre V du Code de procédure civile vise à simplifier et valoriser tous les modes amiables – médiation, conciliation, procédure participative – qu’ils soient conventionnels ou judiciaires.

Principaux apports :

  • Instauration d’un cadre unifié fondé sur la confidentialité, l’impartialité et la libre disposition des droits (articles 1528 et suivants).
  • Possibilité pour le juge de convoquer les parties à une réunion d’information sur la médiation ou la conciliation, sous peine d’une amende civile pouvant aller jusqu’à 10 000 € en cas d’absence injustifiée.
  • Interruption du délai de péremption lorsque les parties ont donné leur accord au juge pour qu’il ordonne une conciliation menée par un conciliateur de justice ou une médiation.
  • Généralisation de l’Audience de Règlement Amiable (ARA) à toutes les juridictions (hors conseil de prud’hommes), avec interruption du délai de péremption entre la décision de convocation et la dernière audience d’ARA.
  • Conciliation et médiation conventionnelle en cours d’instance : nouveau cas d’interruption du délai de péremption.

Accords amiables : une force exécutoire renforcée

Le décret facilite également la mise en œuvre des accords issus d’un MARD :

  • Le juge peut conférer force exécutoire à un accord de deux façons :
    • Homologation judiciaire possible, même pour un accord sans concessions réciproques,
    • Accord constaté par lui-même.
  • Apposition de la formule exécutoire sur des accords contresignés par avocats, y compris hors médiation ou conciliation.