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Administratif

Préjudices post-vaccinaux : affermissement de la jurisprudence Douchet par le Conseil d’État

Par Emma SANSIQUET19 mai 2025Pas de commentaires

Par deux arrêts rendus le 20 mars 2025 (n° 472778 et n° 490789), le Conseil d’État poursuit la consolidation de sa grille d’analyse du lien de causalité entre vaccination et pathologie, dans le prolongement direct de l’arrêt Douchet (CE, 29 sept. 2021, n° 435323).

Ces décisions renforcent la portée de cette jurisprudence, tant sur le plan du contrôle opéré par le juge que sur les principes directeurs applicables à la preuve du lien causal.

Pour rappel, la jurisprudence Douchet repose sur un schéma d’analyse en deux étapes :

D’abord, l’existence d’une probabilité non nulle de lien entre la vaccination et la pathologie développée, ce au regard du dernier état des connaissances scientifiques.

Ensuite, et si cette première condition est remplie, l’analyse circonstanciée des faits, au travers d’un faisceau d’indices (indice temporel, absence d’autre cause…).

Cette méthode, née dans le cadre des vaccinations obligatoires, est ici étendue aux vaccinations administrées dans un contexte d’urgence sanitaire (affaire n° 490789), réaffirmant l’application du régime de solidarité nationale en matière de vaccination contre la grippe H1N1 (v. CE, 27 mai 2016, Milliex et Montaggioni).

Dans l’affaire n° 472778, relative à une vaccination contre l’hépatite B suivie d’un diagnostic tardif de fibromyalgie, le Conseil d’État souligne que l’absence totale de probabilité d’un lien causal – telle qu’établie par l’avis médical et la littérature médicale – exonère le juge d’examiner les circonstances de l’espèce. Il rappelle que cette évaluation repoe sur une base scientifique actualisée, établie par des publications reconnues. En l’absence de telles références, le juge doit conclure à l’inexistence de lien, et ainsi rejeter la demande.

Cet arrêt réaffirme également que c’est la date d’apparition des premiers symptômes, et non celle du diagnostic, qui doit servir de référence. Une lecture contraire, comme l’avait fait la Cour administrative d’appel de Douai, constituerait une erreur de droit.

Par ailleurs, dans l’affaire n° 490789, le Conseil d’État valide l’analyse des juges du fond qui ont reconnu une probabilité non nulle entre le vaccin Panenza et la narcolepsie, en se fondant sur des études relatives à un vaccin similaire (Pandemrix).

Enfin, quant à l’absence d’autre cause, le Conseil d’État confirme qu’une prédisposition génétique ne saurait constituer une cause étrangère exonératoire, à défaut d’être exclusive et déterminante.

Ces décisions confirment que le Conseil d’État, dans une logique de cohérence et d’équité, entend asseoir une jurisprudence exigeante par laquelle la reconnaissance du lien causal ne repose plus sur une certitude scientifique absolue, mais sur une probabilité raisonnable éclairée par les faits et les données contemporaines, dans une dynamique de socialisation des risques.

Référence : Conseil d’Etat, 20 mars 2025 n° 472778 et n° 490789