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Par un arrêt en date du 1er juin 2016, le Conseil d’Etat confirme, et ce de manière logique, « qu’en l‘absence de dispositions d’un plan d’occupation des sols spécialement applicables à la modification des immeubles existants, la circonstance qu’une de ces constructions ne soit pas conforme à certaines dispositions de ce plan ne s’oppose pas à la délivrance d’un permis de construire la concernant si les travaux autorisés doivent rendre la construction plus conforme aux dispositions méconnues ou s’ils sont étrangers à ces dispositions. »

En l’espèce, il s’agissait de travaux tendant à la surélévation d’un bâtiment implanté en méconnaissance des dispositions du Règlement du plan d’occupation des sols relatives à l’implantation des constructions par rapport aux limites séparatives.

© herreneck - Fotolia.com

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La Haute Juridiction écarte l’application des dispositions de l’Article 7 du Règlement du plan d’occupation des sols applicable à la zone du terrain d’assiette du projet, en considérant que les règles d’implantation des constructions par rapport à la limite séparative de propriété prévue par l’Article du Règlement visé, ne concernaient que les bâtiments nouveaux.

Dès lors, le Conseil d’Etat juge que la Cour avait pu à bon droit écarter l’application de ces dispositions, qui n’étaient pas applicables aux bâtiments qui existaient à la date d’édiction du plan d’occupation des sols de la Commune, en jugeant qu’elles ne pouvaient faire obstacle aux travaux litigieux effectués sur un bâtiment agricole édifié avant cette date.

Cette décision s’inscrit dans la mouvance de la jurisprudence dite SEKLER.

Dans l’arrêt SEKLER du 27 mai 1988 n°795 30, le Conseil d’Etat a en effet énoncé que la circonstance qu’une construction existante initialement conforme aux prescriptions d’urbanisme qui lui étaient opposables méconnaît une ou plusieurs dispositions d’un plan local d’urbanisme régulièrement approuvé ne s’oppose pas, en l’absence de dispositions de ce plan spécialement applicable à la modification des immeubles existants, à la délivrance ultérieure d’un permis s’il s’agit de travaux :

  • soit destinés à rendre l’immeuble conforme aux dispositions règlementaires méconnues,
  • soit étrangers aux dispositions méconnues.

Rappelons que, s’agissant des constructions illicites, la demande de régularisation doit porter sur l’ensemble de l’immeuble (Conseil d’Etat 9 juillet 1986 n°511 72 Mme THALAMY).

S’agissant des constructions non conformes, la conformité aux règles d’urbanismes des travaux envisagés s’apprécie par rapport à l’existant. Il n’est ainsi pas nécessairement requis une régularisation préalable et intégrale de la construction, puisque la régularisation ne peut être que partielle.

Dans un arrêt du 13 décembre 2013 n°349 081, le Conseil d’Etat rappelle que « lorsqu’une construction a fait l’objet de transformations sans les autorisations d’urbanismes requises, il appartient au propriétaire qui envisage de faire de nouveaux travaux de déposer une déclaration ou de présenter une demande de permis portant sur l’ensemble des éléments de la construction, qui ont eu ou auront pour effet de modifier le bâtiment tel qu’il avait été initialement approuvé. »

Il en va ainsi même dans le cas où les éléments de constructions résultant de ces travaux ne prennent pas directement appui sur une partie de l’édifice réalisé sans autorisation.

Il appartient à l’administration de statuer au vu de l’ensemble des pièces du dossier en tenant compte le cas échéant de l’application des dispositions de l’Article L111-12 du Code de l’Urbanisme, issu de la Loi n°2006-872 du 13 juillet 2006, emportant régularisation des travaux réalisés depuis plus de 10 ans. »

Dans l’espèce du 1er juin 2016 ayant conduit le Conseil d’Etat à faire une nouvelle application de la jurisprudence dite SEKLER, le projet poursuivi par le pétitionnaire portait sur des travaux d’extension et de surélévation d’un bâtiment agricole, implanté en limite séparative de propriété.

Suite à un premier refus tiré de la méconnaissance des dispositions de l’Article UD7 du règlement du plan d’occupation des sols, qui interdisait la construction de bâtiments joignant la limite parcellaire, le pétitionnaire qui n’avait pas contesté ce refus a présenté une nouvelle demande de permis de construire portant uniquement sur le réaménagement du rez-de-chaussée du bâtiment.

Suite à la délivrance du permis de construire, le pétitionnaire a fait procéder à des travaux de surélévation non autorisés, qui ont conduit le Maire à dresser procès-verbal d’infraction et à prendre un arrêté interruptif de travaux.

Le propriétaire, afin de régulariser les travaux, a déposé une demande de permis de construire, qui a fait l’objet d’un refus, refus annulé par la décision de la Cour Administrative d’Appel de MARSEILLE.

Le Conseil d’Etat confirme l’appréciation retenue par la Cour.

Le règlement du plan d’occupation des sols de la commune énonçait en effet que « la distance comptée horizontalement de tous points d’un bâtiment nouveau au point le plus proche des limites séparatives de la parcelle doit être au moins égale à 4 mètres et jamais inférieure à la moitié de la différence d’altitude entre ces deux points. La construction d’un bâtiment joignant les limites parcellaires est interdite. »

La Cour a exactement et logiquement considéré qu’il résultait de ces dispositions qui concernent les bâtiments nouveaux, que l’implantation du bâtiment de la pétitionnaire existant à la date d’entrée en vigueur de ce plan d’occupation des sols n’était pas illégale au regard de l’Article UD7 et que par suite sa surélévation ne méconnaissait pas non plus les règles d’implantation des constructions posées par cet article.

Dès lors, la Commune, qui n’avait pas pris le soin de préciser que ces dispositions étaient applicables à la modification des immeubles existants dans son POS mais avait, au contraire manifesté son souhait de ne voir appliquer ces règles d’implantation qu’aux nouvelles constructions, ne pouvait se prévaloir de la violation des règles applicables aux seuls bâtiments nouveaux.

Ainsi, si la construction était certes devenue illégale à raison de la réalisation de travaux sans permis, puisque le permis de construire délivré par la commune portait sur les seuls travaux de réaménagement du rez-de-chaussée, le Conseil d’Etat après avoir rappelé les principes issus de la jurisprudence SEKLER aux travaux sur constructions existantes, écarte le moyen tiré de la violation de la règle dans la mesure où celle-ci ne s’appliquait qu’aux bâtiments nouveaux.

Le Conseil d’Etat rappelle dans un premier temps que des travaux tendant à la surélévation d’un bâtiment implanté en méconnaissance du plan d’occupation des sols relatif à l’implantation des constructions par rapport aux limites séparatives ne sont pas étrangers à ces dispositions et n’ont pas pour objet de rendre le bâtiment plus conforme à celles-ci, mais écarte cependant la violation de la règle, puisque celle-ci n’avait pas vocation à s’appliquer aux bâtiments déjà existants.

En général, le Conseil d’Etat reconnaîtra difficilement le bénéfice de la jurisprudence SEKLER au pétitionnaire, quand les travaux emportent surélévation du bâti, même uniquement à l’égout de toiture si la règle méconnue était une règle de prospect par rapport aux limites séparatives (Conseil d’Etat section 15 mai 1992 n°90397), ou par rapport aux axes des voies publiques.

Dans un arrêt du 30 septembre 2014 n°13LY01882, la Cour Administrative d’Appel de LYON a ainsi eu à traiter de l’extension et de la surélévation de la toiture d’un bâtiment existant implanté en méconnaissance des dispositions du document d’ urbanisme pour annuler le permis de construire délivré au pétitionnaire :

« Considérant que, lorsqu’une construction existante n’est pas conforme à  une disposition d’un Plan d’Occupation des Sols régulièrement approuvé, cette circonstance ne s’oppose pas à la délivrance ultérieure d’un permis de construire s’il s’agit de travaux qui doivent rendre l’immeuble plus conforme aux dispositions réglementaires méconnues ; que, dans l’hypothèse où le permis de construire est relatif à une partie d’un ouvrage indivisible, il y a lieu d’apprécier cette meilleure conformité en tenant compte de l’ensemble de l’ouvrage ;

« Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le bâtiment faisant l’objet du permis de construire du 18 janvier 2012, qui est implanté en plusieurs points à moins de quatre mètres des limites séparatives, ne respecte pas les règles de l’article UC7 énoncées plus haut ; que les travaux autorisés par ce permis, qui comportent en particulier la réalisation d’une extension à usage de cuisine en façade ouest, ne sauraient être regardés comme permettant de mettre en valeur un élément bâti existant au titre de l’ancien article L123-1, alinéa 7 du Code de l’Urbanisme ; que, par ailleurs, ces travaux ne sauraient davantage être regardés comme permettant de respecter la trame bâtie, aucune construction voisine de présentant notamment une telle extension ; que, dans la mesure où ils comportent, sur une hauteur de 0,86 cm, une surélévation de toiture du bâtiment existant, implanté en méconnaissance des dispositions précitées du règlement du Plan d’Occupation des Sols, les travaux litigieux n’étaient pas étrangers auxdites dispositions ; qu’ils ne devaient pas rendre le bâtiment de M. Plaisance plus conforme à ces dispositions ; que,  par suite, le permis de construire accordé le 18 janvier 2012, ne pouvait être légalement délivré ».

Dans ce dossier, la solution était inverse à celle retenue par le Conseil d’Etat dans l’arrêté commenté du 1er juin 2016 dans la mesure où la commune n’avait pas limité l’application de la règle de prospect aux bâtiments nouveaux.

Dans l’élaboration de leur règlement d’urbanisme, les communes ont tout intérêt à bien peser le choix des mots et du libellé de leurs règles sous peine de se les voir opposer en retour.