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Urbanisme

La remise en état si infraction à l’urbanisme : une mesure réelle pas automatique

Par Aude MARTIN23 juin 2023Pas de commentaires

Dans un jugement rendu le 6 mars 2023, le tribunal correctionnel d’ALBERTVILLE n’a pas suivi les réquisitions du procureur de la république en rejetant la mesure de restitution proposée par le parquet.

Force est, en effet, de rappeler que si le juge pénal est tenu de statuer sur cette question (Cass, Crim., 20-02-1992 : n° 91-83.826), l’article L. 480-5 du code de l’urbanisme n’impose aucune obligation de démolition ou de mise en conformité.

Le prononcé de ces mesures est, ainsi, laissé à la faculté discrétionnaire du juge pénal (Cass., Crim., 23-11-1994 : n° 94-80.870 ; Cass., Crim., 21-10-2003 : n° 03-80.802).

Il en est de même nonobstant le fait que cette demande de remise en état a été formulée par la commune ou encore par des voisins immédiats à la construction, c’est-à-dire par une partie civile (Cass., Crim., 4-11-1998 : n° 97-82.569).

Pour décider du prononcé de ces mesures, les juges prennent en compte, par exemple, l’atteinte à la nature ou à l’environnement, à la sécurité publique ou à celles des occupants de la construction irrégulièrement édifiée, les incidences sociales ou économiques (Cass., Crim., 9-04-2002 : n° 01-82.687).

Est également prise en considération l’ingérence dans l’exercice du droit au respect de la vie privée et familiale du prévenu au sens de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme (CEDH, 17-10-2013 : n° 27013/07, Winterstein et a. c/ France ; CCass., 3ème civ., 17-12-2015 : n° 14-22.095).

La personne concernée peut donc utilement invoquer une violation de ces dispositions pour empêcher une démolition qui porterait une atteinte disproportionnée à ses droits, alors même que cette mesure serait justifiée par un motif légitime : celui de l’impératif d’intérêt général poursuivi par la législation de l’urbanisme (CCass., Crim., 10-03-2015 : n° 14-83.329 ; CCass., Crim., 16-02-2016 : n° 15-82.732).

Un contrôle de proportionnalité de la sanction est donc réalisé par le juge répressif pour savoir s’il prononce ou non la mesure de restitution.

Au cas présent, si le prévenu a été condamné pour les faits qui lui étaient reprochés (réalisation de travaux sans autorisation d’urbanisme et/ou en méconnaissance de l’autorisation délivrée), le tribunal correctionnel d’ALBERTVILLE a rejeté la mesure réelle de remise en état sollicitée par le parquet, considérant qu’elle était disproportionnée aux faits pour lesquels le prévenu était poursuivi.

Le tribunal a, ainsi, rendu une décision conforme au droit prétorien et juste au regard du contexte de ce dossier.